Aujourd'hui, c'est un jour pas comme les autres. Aujourd'hui, j'ai senti mon coeur se serrer en me réveillant. Parce qu'il y a huit ans, pendant que je chargeais joyeusement mon sac dans ma voiture, tu me quittais pour t'en aller la ou je ne pouvais te suivre. Alors aujourd'hui, je vais parler un peu, ou beaucoup, de cette blessure qui peine encore à cicatriser comme elle le devrait.
J'avais 15 ans, tu venais d'en avoir 16. On avait la vie à nos pieds, adolescents puérils et inconscients. Enfin pour ma part, toi, c'était autre chose. Ce 22 février 2005, tout a basculé. Cette nuit la, la corde qui s'accrochait à ton cou ne mettait pas seulement fin à ta vie, elle mettait un point final à l'innocence qui jusque la m'avait gardée de toutes les pentes glissantes qui auraient pu avoir raison de moi. Elle mettait fin à cette amitié si particulière, qui a commencé à se construire un jour d'hiver, sur les bancs du cours d'histoire de M Rubez, au collège. Je me souviens de la première fois ou, lassé de nos bavardages avec nos voisins respectifs, il nous a placé l'un à coté de l'autre, sans se douter que de la naîtraient des courses pour savoir lequel de deux arrivait le mieux à suivre son rythme d'écriture infernal, et des fous rires qui se perdraient pendant notre dernière année de collège, avant de se retrouver sur les marches du lycée ou nous étions censés devenir grands, ensemble. Toi, un peu paumé dans cette classe dont tu ne voulais pas. Moi, perdue dans cet enchevêtrement d'hypocrisie sociale. Fatalement, nous étions fait pour nous retrouver cote a cote au fond des salles de cours à voir lequel des deux réussissait le mieux à viser le pot sur nos calculatrices. Et a bien y réfléchir, c'est peut être à toi que je dois mes lacunes énormissimes en mathématiques.
Et puis l'année a passé, toi comme moi nous nous sommes fait des amis, en plus de ceux que nous connaissions déjà. Et les heures de permes défilaient, on découvrait la liberté du lycée, les parties de cartes qu'on refaisait inlassablement, les histoires qu'on inventait en regardant tes dessins. Si j'avais pu avoir quelque chose de toi, j'aurais voulu que ce soit ca. Peut être même cette fille à la cheville enflée qui avait inspiré une si longue histoire à Thomas, assez longue pour que tu aies le temps de t'amuser à écrire ces quelques lettres sur le dos de ma main droite. "KISS". Je me souviens aussi de ce moment, celui qui n'a appartenu qu'à nous. Toi assis dans le couloir, triste. Et moi, assise contre toi, essayant tant bien que mal de t'aider a surmonter un mal dont je n'avais pas idée. Mais ce à ce moment la, nous étions bien. Pour quelques secondes, la terre a cessé de tourner, et quand je me souviens de toi, c'est à ca que j'essaie de penser. Et pourtant, bien souvent je sens monter les larmes que je n'ai jamais cesser de verser.
Les derniers instants deviennent flous avec les années. Je dois maintenant me concentrer vraiment pour faire revivre quelques instants les derniers moments que nous avons partagé. Ton sourire, ton vrai sourire, je ne l'ai vu que ce jour la. Tu sourirais avec les yeux. Et le petit éclat qui brillait au fond de tes pupilles sombres faisait ressortir encore un peu plus le gris bleu de tes iris. Si tu savais comme je suis triste de me dire que le seul jour ou je t'ai vu être heureux est celui ou tu avais déjà décider de t'en aller. Tu n'étais pas à ta place ici, du moins c'est ce que tu as cru. Parce qu'à mes cotés, aux cotés de ta famille et de tes amis, tu étais à ta place. Et les gens qui t'aimaient auraient du être cette petite lumière, cette petite chose qui t'aurait raccroché à la vie. Mais tu es parti. Et moi, quand ces mots ont détruit tout ce en quoi je croyais, je me suis retrouvée la, sans force pour avancer encore en te laissant derrière moi. Si mes derniers moments avec toi deviennent flou, le pire moment de ma vie est bien encré en moi, net et tranchant comme une lame de rasoir. Le bus, l'arrêt, les coups de fils sans réponse, et ces mots "Gaétan a fait une tentative de suicide. Il est mort ce matin". La panique, le déni, le regard d'Anne Laure à coté de moi, l'horreur dans ses yeux me reflétant ma propre image. Descendre du car, hurler, hurler à la face du monde que ca ne pouvait pas être vrai, que tu étais encore la, que tout n'était pas perdu. Et sombrer doucement dans l'oubli, je ne me souviens plus de rien de la fin de cette journée.
Tu restes ma plus grande blessure. Je le dis souvent, tu ne m'as jamais fait de mal, tu m'avais toujours protégée comme tu le pouvais. Il n'y a qu'en partant que tu as failli à ces mots que nous nous disions parfois. Tu m'as dit un jour, que tout finirait par aller mieux. Tu as menti. Mais tout au fond de moi, je me rappelle des bons moments, de nos rires, de nos sourires, de cette partie de vie que j'ai eu la chance de partager avec toi. Et je sais qu'un jour, je réussirai à penser à toi uniquement de cette façon. Mais quoi qu'il arrive, tu me manques.
springsnow
Ca, c'est une petite mine avec une antenne!
Vendredi 22 février 2013 à 9:16
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On devrait pas avoir à en arriver là. On devrait pas. Et cette lueur dans les yeux quand on a décidé de renoncer à tout. Elle est toujours là. On est vrai. Déterminé et vrai.
C'est tellement, tellement, tellement dommage..
Courage.. La douceur des instants que tu racontes montre que tu le vois déjà doucement. Mais la peine, jamais ne s'efface. Elle reste là, lovée au fond de ton coeur.
Je suis désolée..